Amélie Bélanger (Clark Burying Ground)

Nous veillons l’avènement des désastres

2025

la peau du sol en fleurs en flammes

les cheveux blancs comme les promesses des pommiers

la peau du sol en pleurs en rage

nous abandonnent

celleux qui protègent

la peau du sol en sel en croûte

le ciel et ses couleurs la terre et ses racines

entre les deux des sensations

la peau du sol en fritte en flux

des plans d’évacuations

des tornades en juillet

des feux à l’année

la peau du sol en argile en carbone

les bourgeons de pommiers un élixir

rétablir par l’intimité des plantes nos fonctions reproductrices

la peau du sol en refuges en remparts

nous sommes composites

maternelles et polymère

Amélie Bélanger


Au milieu des pommiers, l’installation d’Amélie Bélanger se dresse comme une invitation à traverser la tempête, à embrasser le brasier, à prendre soin de ce qui est là et à veiller sur ce qui pointe à l’horizon. Là, à l’ombre d’un pommier, la pierre tombale d’un couple ayant foulé le verger témoigne d’une autre époque. C’est ici que l’artiste a récolté des résidus de production cidricole pour les transformer en matières à création. Bois mort, brûlé, pétrifié, carbonisé : des troncs au cœur habité de fleurs-insectes-animales.

Loin d’être défaitiste, Bélanger en appelle à faire le deuil d’un monde capitaliste à défaire, à y mettre le feu. Elle encouronne la pierre et son pommier de formes hybridées, y dépose un rituel où macèrent les mutations. Une nouvelle mythologie se dessine. Elle puise chez les épimélides — ces nymphes protectrices des pommiers et des moutons — une énergie vitale à infuser dans la terre. Dans le sillage des désastres écologiques à venir, elle nous enjoint à incarner, ensemble, la résilience nécessaire pour bâtir demain.


Amélie Bélanger fait de l'art comme on entre dans un processus de deuil transformateur. Son travail est une ode aux merveilles horribles et grandioses que nous rencontrerons demain, aujourd'hui, hier et au-delà. Elle travaille les mots et la matière sous différentes formes, notamment en collaborant avec la terre, le feu et les plantes dans la création de tissus, de papiers et de teintures végétales. L’artiste vit et travaille sur le territoire traditionnel et non cédé de la Nation W8banaki, le Ndakinna, dans le village de Frelighsburg. De concert avec des fermes de la région, elle récupère des résidus de production agricole afin de les intégrer à sa pratique.