Anne-Marie Proulx (Frelighsburg Methodist Cemetery) 

Petits fruits

en conversation avec Tanya Lalo Penashue

2017-2025

Nous nous remémorons les lieux de nos cueillettes passées, nous accueillons la noirceur des disparitions et les espaces qu’elle crée en nous. Le feu accompagne les adieux, consume les regrets. Nos grand-mères partent mais veillent encore. Elles nous rappellent que nous verrons bientôt apparaître de nouveaux petits fruits.

Anne-Marie Proulx

Petits fruits tisse une conversation visuelle et sonore autour du territoire, du partage et de la transmission. L’installation photographique déployée à la lisière du cimetière fait écho aux extraits d’un dialogue entre l’artiste et son amie Tanya Lalo Penashue, dans lesquels elles revisitent les paysages de leurs cueillettes passées. Tapis de graines rouges, ronces de chicoutai et buissons de bleuets sauvages ; chaque souvenir évoque l’héritage de leurs grand-mères, qui leur ont enseigné gestes et savoirs, inscrivant la cueillette dans un rapport au territoire à la fois intime et intergénérationnel.

Enracinée dans une réflexion sur la cyclicité, entre disparition et renouveau, la conversation qui passe de l’innu-aimun au français souligne le passage de proches qui sont parti·es, mais dont la présence se fait encore sentir. Tandis que les mots échangés ramènent à la surface les souvenirs qui les lient au territoire, les images s’offrent comme témoins des réapparitions à venir : celle des baies, peut-être, mais aussi des liens qui se créent malgré les distances et dans les entre-mondes. 

Anne-Marie Proulx vit et travaille le long du fleuve, entre Saint-Roch-des-Aulnaies et Québec. Puisant dans nos conversations avec les territoires, et dans nos relations avec le langage, elle crée des univers poétiques qui interpellent les liens que nous entretenons avec nos environnements. Son travail de l’image entre souvent en dialogue avec des textes, des sons ou des vidéos, et interroge les espaces tant physiques que métaphoriques que nous occupons et qui inversement aussi nous habitent. 

Tanya Lalo Penashue est de Pakuashipi, communauté située sur la Basse-Côte-Nord aux abords de la Pakua Shipu, une grande rivière qui mène vers le nutshimit, où les Innus vivaient traditionnellement durant la saison hivernale, suivant les hardes de caribous. Ayant reçu les enseignements de sa grand-mère maternelle avec qui elle a parcouru l’intérieur des terres, elle les transmet à son tour à ses enfants. Entrepreneuse, elle a ouvert un dépanneur pour servir sa communauté.